ft. Ace - one piece
oh, bougonner, ça tu sais faire hein. Froncer les sourcils et faire claquer ta langue, lever les yeux au ciel et jeter ce que tu tenais. foutre des coups de pieds dans les chaises, enfoncer ton poings dans un mur, déglinguer tes doigts encore
et encore jusqu’à ne plus les sentir, exploser tes phalanges sur des visages que tu connais à peine,
tous les jours, pour un regard de travers ou parce qu’on te l’a demandé. Esteban, toutes ces choses que tu
pourrais faire avec ces mains, avec cette
volonté, avec cette
hargne. Si tu savais, prenais conscience, du pouvoir que tu as entre ces deux grandes mains robustes, tu pourrais réaliser tous ces rêves que ton cerveau n’ose même pas imaginer.
regarde toi, tomber en lambeau, coup après coup, jour après jour, tu te dégrades, tu t’effrites tu perds
tout. t’as plus de cerveau gros débile, à force, t’as perdu un bout d’oreille, t’as le nez défoncé et pour toujours il sera tordu. Tu t’en fous hein
gros con, tu vas pas tarder à crever,
tu crois ? pense à ta mère et aux petits. mais non, tu sais pas faire ça, c’est vrai,
égoïste. tu penses à rien de toutes manière t’as pas de cerveau, tu l’as cramé aux coups et au shit. t’es vide et quand y’a un truc qui fait le chemin jusque la haut c’est juste que t’es parano, complètement. et tu marmonnes doucement et
putain tu vois pas que tu fais peur à ta sœur ?
c’est marrant ça, le fait que tout ça ne te dérange pas. en fait ton cocon, ton nid douillet, c’est juste toi dans ta p’tite rue sale, à péter des joints de midi à minuit. attendre qu’un gars se pointe et lui filer ce qu’il veut sans trop parler, et rester debout à
ne rien penser.
y’a quoi dans cette putain de tête ?
tu sais être doux, pourtant, couvrir ton foyer de cadeaux, héberger les jumeaux dans ton lit parce qu’il y a un orage, caresser les cheveux de ta mère devant un film, rire à gorge déployée, cuisiner des marmites entières, essayer de gratter 3 trucs sur ta guitare pour leur faire le pestacle. le pire c’est que
t'aimes ça. le pire du pire, c’est que
t’es comme ça. mais esteban le grand le fort le vaillant, ne veut
rien changer ni au bon ni au mauvais. esteban ce qu’il veut c’est avancer, les sourcils froncés, persévérer dans cette routine sans fin sans
possibilités, sans
espoirs, avancer face au soleil, aux
bourrasques d’hier et de demain sans jamais
jamais se retourner.
esteban il regarde pas derrière, il s'en fout, quand c'est fini ça n'existe plus ! comment tu expliques que ca continue pourtant à saigner, hein ? si
seulement on pouvait envoyer la vie valser d'un coup de main, ça serait facile mais la vie ça marche pas comme ça tu sais.
« @$! »
x cheveux noirs ondulés mais sur un coup de tête il lui arrive de tout raser
x 1m79 quand il arrête de regarder ses pieds
x des cicatrices partout, à foison
x un anneau à chaque oreille
x trapu
x lacoste tn, ou alors t-shirt survet, parfois jean défoncé
x voix rocailleuse à force de fumer
x assez habile en vrai
x« Pas toi, Gio.. Sérieux pas toi. »
Il aurait pu mourir de chagrin, comme ces oiseaux au cœur fragile. Il n'avait connu que cet homme d'assez fort pour lui sortir la tête de la merde dans laquelle il pataugeait depuis sa naissance.« Parce qu'Esteban est né d'une famille plutôt nombreuse et plus que populaire, il n'avait jamais eu la chance que de porter les vêtements de ses aînés, faisant traîner quelques années de plus les trous aux genoux qu'on ne comptait pas rabibocher. En grandissant il en a fait des bêtises pour ramener des sous à la maison, me faire des cadeaux à moi, sa petite sœur adorée, acheter des survêtements de l'équipe de foot a la mode pour les petits frères. Dans le réseau il n'était personne, vous pensez bien qu'à 14 ans on n'offre la seule responsabilité que de crier aux autres quand la police arrive.
Il ne traînait ses pattes jusqu'à l'école que quand maman recevait des avertissements d'absences, et encore. Dans notre HLM miteux nous vivions au 2eme étage, en face de la vieille Rodriguez. Elle n'était pas méchante, mais Esté ne la sentait pas même si moi, Callista, je le forçais parfois à répondre
"Bonjour". Mais il ne voyait en elle qu'une commère qui passait ses jours derrière sa porte entrebâillée, à attendre des heures incalculable une personne à saluer. Il la trouvait insupportable.
Mais un jour t'es sorti de chez elle et t'as illuminé sa vie, t'as changé son comportement et t'es devenu comme son frère, sa moitié, j'irai même jusqu'à dire sa vie presque.
Je crois que tes parents ne pouvaient juste pas te garder un moment, puis que finalement t'avais fini par t'établir chez elle sur le long terme. Peut-être que tu l'avais expliqué à mon frère mais en tout cas je n'en sais pas plus. D'ailleurs vous étiez marrants au début, parce que mon frère et toi c'était vraiment pas fait pour fonctionner, je veux dire que t'es un ange t'es d'une douceur intense Giovanni, alors qu'Esteban c'est une boule de colère et de conneries.
Au début tu forçais un peu avec Esteban qui te repoussait sans vraiment te remarquer, mais au fur et a mesure vous avez finis par vous entendre. C'était trop marrant à regarder en vrai, parce que t'étais un peu plus jeune donc tu te rendais pas compte à quel point tu lui collais au cul.
« MAIS MERDE, A QUOI TU JOUES ? BORDEL ! »
Il était à deux doigts de t'envoyer son poings aux phalanges déjà écorchées ce jour là. Fallait pas que tu le suives cette fois ci, quand il avait passé un mec à tabac parce qu'on le lui avait demandé, parce que c'était comme ça. Mais pas pour toi, qui t'étais interposé alors que t'étais même pas sensé être aux alentours. Ce que t'as pu être idiot et l'énerver..
« Pourquoi tu fais ça ? C'est immoral ! »
« J’vais te la foutre dans l'cul ta morale, dégage. »
Tu tremblais mais t'avais refusé, il t'en avait collé une quand même parce que l'autre gars avait fini par se casser en courant. J'le sais tu me l'avais dit, je t'avais demandé pourquoi vous vous faisiez la gueule, j'avais faillit rire. C'est pas dans ce quartier que tu risquais de trouver un deuxième justicier de ta trempe, loin de là. Et même s'il avait été long à accepter, il ne pouvait rien me refuser. Je vous avais forcé à discuter ensemble de l'événement et c'est à ce moment-là que vous avez commencé à tout vous dire, plus de secret et une franchise à clouer le bec.
Bon, il te parlait plutôt mal mais à force t'avais commencé à t'y habituer et à lui répondre avec la même audace aussi, tu savais le piquer. Pour l'énerver t'avais le truc, c'est sûr ! Mais jamais plus il ne t'avait levé la main dessus, il les méritait tous ces mots aiguisés qui sortaient de ta bouche et qui contrastaient d'ailleurs avec ton caractère doux et presque introverti. Cependant jamais tu n'avais haussé la voix sur lui, ç'aurait été bien trop contradictoire avec ce que tu dégageais.
Ça ne faisait à ce moment là qu'un an que nous te connaissions et, même si tu ne l'as jamais su et que jamais tu n'en prendras connaissance, ni toi ni personne d'autre, je commençais à t'aimer d'une force incroyable. Un garçon parfait, beau et bien bâti, un cœur en or et qui avait su faire devenir de mon frère une personne respectable. De plus en plus, tu savais le recadrer quand il faisait un pas de travers, maman en était presque jalouse. Je me souviens qu'elle te le disait souvent quand tu venais à la maison et que ça te faisait sourire.
Mais on se souvient aussi lorsque t'es venu en courant pour ouvrir notre porte comme un fou. C'était deux ans plus tard, t'étais paniqué.
« Mamie se relève pas ! »
Et même s'il la haïssait, c'est Esté qui est parti la chercher en courant et qui a dévalé les escaliers en la portant comme il le pouvait, nous hurlant d'appeler les pompiers. Elle était déjà morte, mais il ne voulait pas que tu penses qu'il baissait les bras. Parce que pour toi il ne baissera jamais rien, ni les bras, ni sa garde, ni les yeux.
Après ça t'étais resté vivre avec nous, à la maison, et ce ne fût pas pour me déplaire. Vous ressembliez vraiment à deux frères, les mecs du quartier disaient que vous étiez gays et ça le faisait hurler de rire mon frère, mais pas moi. Franchement, si t'étais gay j'aurais été plutôt mal, hein ! Mais peut-être que c'était le cas, que tu ressentais quelque chose pour mon frère ? Puisque nous ne sommes jamais sortis ensemble finalement, ça n'aurait pas changé grand chose.
Toi tu t'en fichais d'eux, et tu disais souvent à Esté qu'ils riraient moins quand tu les aurais arrêtés. Tu pouvais remettre un garçon sur le droit chemin, mais avec le nombre de voyous qu'on avait dans la rue, t'étais assez lucide pour te rendre compte que t'étais pas un Dieu. T'avais choisi de t'engager pour une cause noble, tu honorais les policiers et tous ceux dont le métier était de rétablir l'ordre, ça te passionnait et ça foutait la pression à mon frère. Pas plus mal.
C'est pour ça que cette année à Noel, quand les voisins sont partis se coucher en laissant les bougies sur le sapin et que l'immeuble s'était embrasé t'avais essayé de nous mettre à l'abri. Comme si t'avais rien à perdre, t'avais réveillé toute la tribu qui s'était réunie sur le balcon en attendant les pompiers. Les flammes prenaient de plus en plus d'ampleur, la fumée brouillait ta respiration mais le tintement qui retentissait jusqu'à ton oreille provenait de la chambre du fond, la mienne. T'étais parti comme une furie, persuadé qu'il restait quelqu'un là- bas. Si seulement t'avais pris le temps de nous compter t'aurais saisi que c'était dans ta tête.
« GIO ! »
Avait hurlé Esté à plein poumon. Des veines étaient instantanément apparues le long de son cou, c'est la dernière image que j'ai eu de lui. Son cris, mes frissons.
« ESTEBAN ! »
M'étais-je égosillée à mon tour sans pouvoir vous poursuivre, maman m'avait fermement attrapé le bras, j'ai eu mal. Mais pas aussi mal que ce que m'a causé la douleur de votre disparition.
Et même si c'était de la fenêtre que tu entendais ton nom, tu cherchais désespérément quelqu'un à sauver. T'es incroyable Giovanni, à court d'oxygène tu cherchais. Même avec mon frère qui te tirait, te hurlant de revenir. On vous entendait à peine à travers le grésillement des flammes et mes sanglots, mais vos cris perçaient mon cœur.
S'engouffrant un peu plus dans l'appartement, vous étiez pris au piège par le feu. Grand débile, qu'est ce qui s'est passé dans ta tête pour que t’essaies de revenir sur tes pas ?
« SORT PAR LA FENÊTRE ! »
T'avais lancé ça avant de t'envoyer dans le feu, avant qu'Esteban ne te tire vers la-dite fenêtre, avant que vous ne disparaissiez à jamais. Moi qui pensais pouvoir me moquer de vos plâtres jusqu'à ce que vous vous rétablissiez de cette chute.
Esteban est sorti en premier, te forçant à le suivre, t’agrippant de toute son âme.
Tu as peut-être été happé par cette fenêtre qui fût ton échappatoire, mais pour lui c'était rien toi qu'il lui fallait pour s'enfuir.
Jamais sans toi. »
- Callista Castelianos
Après leur arrivée, Esteban s'était réveillé à l'auberge aux côtés de Giovanni, qui lui n'avait pas eu autant de chance. L'homme avait été brûlé et en garderait les traces à jamais. Cette fois ci l'accueil du Maire ne fût pas aussi jovial qu'à l'accoutumée, Esteban est loin d'être un pleurnichard mais là il avait eu beaucoup de mal à se retenir. Le menton tremblant, il avait voulu attraper la main de son ami mais s'était rétracté au dernier instant, ne souhaitant pas amplifier la douleur qu'il devait certainement ressentir.
« Qu'est-ce qu'il a..? »
Esteban était étrangement docile ce soir là. Inspirant, le Maire resserrait ses poings sur sa canne en bois foncé.
« Il comate. Le passage n'a pas dû supporter de transférer deux personnes en même temps à Phyméris »
Il s'était retenu de hurler au vieil homme qu'il
"fallait réparer cette p*tain de fenêtre de m*rde, vieux c*n" et se contractait comme il le pouvait, au cas où Gio' avait quand même la capacité d'écouter. Il questionna l'homme afin de savoir comment travailler, comment le soigner, sans remarquer qu'il n'était peut-être même pas sur Terre. Il le comprendra plus tard. Grace à Grim tout avait été rapide, il avait trouvé de quoi le faire travailler au port. Il est depuis quelques jours apprenti charpentier et s'occupe de réparer les bateaux écorchés par des flots trop violents. Il travaille sans relâche, quand il s'arrête il veille sur son ami. Il prend très peu de temps pour s'occuper de lui et il se déteste de savoir que s'il avait juste balancé Giovanni par-dessus bord, c'est lui qui péterait la forme. Puis il est plus robuste que son petit Gio.. Un tas de reproches envers lui-même se bousculaient dans sa tête qui n'avait jamais autant été encombrée.
Se dire qu'il pouvait trépasser dans son sommeil ça le hantait, jamais une telle responsabilité n'avait fait si forte pression sur lui.
Ne t'inquiète pas brave oiseau, il s'en sortira. Ça tu le sais, n'en doute pas.