Damned for eternity, but you're coming with me < Seraphine >

Il est tard. Le mauvais esprit tiraillé par l’envie d’apprivoiser la nouveauté convoite la drague, les rencontres, la populace pour se divertir, pour ne pas mourir d’ennui, parce qu’il faut bien trouver un moyen de s’occuper. Dans la pénombre de la cité, elle finit par trouver le chemin vers une bar chaleureux. A peine entrée, son parfum commence à embaumer la pièce, le bruit de ses talons cogne contre le sol : elle aime se faire remarquer. Le visage souriant s’approche directement du comptoir pour commander sans patienter, tandis qu’elle cherche une table à venir squatter, tandis qu’elle cherche un nouvel hôte avec lequel papillonner.

Edmée contemple la foule, les visages qu’elle ne connaît pas. Edmée, elle finit par cesser de penser, de bouger, de médire : elle n’est pas sûre, plisse les paupières en feuilletant dans les pages floues de sa mémoire qui cette femme serait : Séraphine, du lycée. Le visage affiche la surprise avant même de la retrouver, puis dans un second temps un large sourire carnassier vient s’y ajouter. C’est que cela fait bien des années qu’elles ne se sont pas croisées et ses seuls souvenirs sont les vieilles piques plantées à même l’épiderme, les jeux taquins : Edmée aimait bien la chercher, Edmée aimait bien la faire s’impatienter : témoignage adolescent d’un désir qui germait contre ses lippes, elle lui plaisait.

Edémée reprend son rôle de parasite, de squatteuse. Une fois armée de son cocktail entre les doigts, elle s’invite gratuitement à la table de Séraphine et de l’inconnue, le sourire charmeur brodé contre les lèvres maquillées, son initiative est douteuse : elle cherche à provoquer, elle cherche à choquer, elle cherche à stimuler les nerfs de Séraphine, comme elle l’a si bien fait par le passé. Ce sera probablement la meilleure attraction de la soirée, elle est sûre qu’elle n’a pas changé : qu’il y a toujours un peu d’animosité, de tension à faire brûler. Elle aime jouer avec le feu, peu importe si elle finit par avoir l’un de ses baisers, Edmée cherche seulement à s’amuser, mais il est vrai qu’elle a toujours eu un faible pour la difficulté. Elle ne se refuserait aucune opportunité.
Furtive, elle s’incruste carrément sur l’un des sièges à côté de Séraphine, joue le fantôme du passé, Edmée est revenue avec plaisir la hanter.

- Bonsoir, j’espère que la soirée est agréable. Je ne vais pas m’excuser de m’inviter, après tout, je suis sûre que je t’ai manquée, Séraphine…

Elle aspire quelques gorgées de son cocktail coloré, le visage creusé par une raillerie à peine dissimulée.
Une œillade accordée à l’inconnue, ce n’est pas pour elle qu’Edmée est venue. Peut-être s’occupera t-elle d’elle une prochaine fois, mais pour le moment, elle ne s’en préoccupe pas. Elle sera pardonner...
Les iris dorées convoitent Séraphine pour la soirée, ou peut-être pour une période indéterminée.

- Nous finissons même par nous retrouver ici, après toutes ces années… Notre rencontre est encore brodée dans ta destinée.

Après toutes ces années, Edmée ne prend rien au sérieux, témoignant d'un sourire taquin, légèrement vicieux. Elle n’est pas du genre à croire à ces sornettes.