Crise d'ado [sera+noam]

Les jours s’étirent toujours presque de la même manière à Phymeris. Séraphine s’y est habituée, se plaît presque à enfiler ses tailleurs pour aller jouer les nounous plus que les assistantes auprès de Noam. C’est que les années ont passé et même avec un coeur plus mécanique qu’émotif, Séraphine s’est attachée. Elle s’est faite à la vie si douce de Phymeris, refuse toujours de l’admettre, râle toujours mais sourit derrière les réprimandes.
Alors elle pourrait presque afficher un rictus en saluant son patron le matin mais elle porte toujours l’air trop rêche, plus encore depuis les festivités lui ayant coûté sa voix. Elle ne salue que d’un hochement de tête, travaille silencieusement et réprimande uniquement du regard dur, la voix ne s’élevant qu’en chuchotements changeant de son habituelle voix si tranchante. Oh, Noam doit bien se délecter, elle le sait, elle le sent à chaque seconde de la matinée, soupire à chaque fois, pince les lèvres et se remet au travail. Elle n’a jamais été si silencieuse, Séraphine, pas lorsqu’il est question de s’indigner des bêtises. Alors c’est agaçant, c’est très frustrant de ne pouvoir que jauger Noam, le sourcil haussé et les lèvres serrées (oh oui parce que répondre à ses frasques ne donnerait que plus de joie à Noam)  

Sauf que Noam s’enlise toujours assez pour courroucer son assistante. C’est progressif, une lente montée vers l’inacceptable. Il enfile son manteau et parle des bas-fonds de Phymeris ; Séraphine se contente de le jauger du regard, un sourcil haussé car que peut bien faire Noam Ozkan à Mephala, surtout à cette heure tardive ? Si la question ne sort pas des lèvres, le visage exprime bien l’attente d’une explication. Après tout, Séraphine a bien fini par se sentir responsable de l’imbécile qui l’emploie, s'inquiète et s'agace bien parce qu'elle a l’ombre d’un instinct protecteur qui s’est développé au fil des années                                  (juste un peu)
Ah comme le regard juge déjà Noam, le réprimande déjà parce qu’elle a pris l’habitude des frasques du jeune homme, s’est faite à l’idée qu’il faut souvent passer derrière pour sauver les meubles ou guider le chiot. Il n’est pas mauvais, Noam, juste impétueux et Séraphine a fini par croire à ses buts, s’improvise bien professeur de ce futur maire puisque ses idéaux sont parfaits pour le monde si particulier de Phymeris.
Quelle est la surprise, donc, d’entendre Noam parler de la mafia locale ! La figure se froisse automatiquement, les plis contrariés s’affichant nettement entre les sourcils froncés et comme on ne peut pas le retenir, ah non ! La chaise crisse sur le sol quand le corps se lève, la voix s’égosillant, partant dans les aigus pour s’échouer en croassement rocailleux, ah–  

– Noam tes blagues sont de mauvais goût, surtout quand on veut être maire. Et ma puce ? Sérieusement ?

Et si elle se rassure avec la farce, Séraphine a quand même ce doute face à Noam, oh, il serait bien capable de s’enliser dans des bourbiers irrémédiablement et Séraphine ne peut que s’en agacer, les lèvres rendues à un simple trait rouge et mécontent, maudissant la voix qui faillit lorsqu’elle voudrait faire la leçon à ce boss si terrible. Elle en oublie les leçons sur la bienséance et les petits noms corrects à utiliser pour la nommer. Les mains se crispent et les talons s’empressent de claquer sur le sol, un dernier claquement des aiguilles ponctuant le déplaisir évident pour remplacer la voix qui ne peut gronder. Séraphine le toise, le fusille bien du regard pour compenser cette voix qu’elle doit garder basse pour ne pas la faire vriller.

– T’as intérêt à me dire que c’est bien une blague ces histoires, un lien avec la Famille c’est donner les armes parfaites à l’opposition pour démonter ta crédibilité.